J'avais totalement oublié qu'il y avait rassemblement des mécontents aujourd'hui à l'appel des syndicats. Et je découvre avec stupeur que ces manifs de la grogne ont dégénéré car des casseurs, notamment à Paris, se sont immiscés dans la foule pour mettre le bordel. D'où des réactions des forces de l'ordre assez musclées qui ont fait des blessés des deux côtés. Pas étonnant : en 1968, un enseignant de l'école de Police de Saint-Cyr à côté de Lyon avait carrément dit que la police recrutait parmi la racaille afin de faire de la provocation en marge des manifs, racaille formée, selon ses dires, par la police elle-même (laquelle, ne me le demandez pas, je connais pas le milieu de l'ordre public). Est-ce vrai ? Peu importe.
Toujours est-il qu'il en est qui profitent de la contestation pour casser du flic, des vitrines, des bagnoles... Qui tapent pour le plaisir, qui cognent pour retourner les forces de l'ordre contre les manifestants même pacifiques. Triste société où la liberté est de plus en plus contrainte et dans laquelle un petit nombre met à profit le désarroi pour induire une violence policière et pas que. Vous aimeriez qu'on vous cogne alors que vous revendiquez pacifiquement ? Certainement pas. Alors vous riposteriez et feriez en sorte de n'être pas le seul à gagner des orions douloureux.
C'est tout de même regrettable que quelques uns sèment la panique et attisent la violence. C'est d'autant plus injustifié que ces rassemblements disent le désarroi et la colère dans lequels se trouve la population. Une population qui se fâche parce qu'elle se sent grugée par les politiques et la politique. Tant d'espoirs étaient nés de l'alternance... Tout le monde a cru que le retour de la gauche ferait bouger les lignes, qu'il serait entendu et compris. Las, rien n'en a été. Il est vrai que l'on met tous ses espoirs dans le changement, parce qu'on estime que la gouvernance politique est là pour améliorer la vie du citoyen et non pour la pourrir. Or, les hommes politiques, coincés entre leur idéologie et les réalités sociales, économiques, politiques, tentent d'agir dans le sens citoyen, mais ils sont confrontés à la dure vérité d'un monde en plein bouleversement et donc contraints de prendre en compte les difficultés provoqués par la mondialisation, les marchés financiers, les relations internationales ainsi que par l'évolution inéluctable d'une société qui refuse le changement. Pas simple.
Si certains ne bougent pas le petit doigt, d'autres assument et défilent. Parce qu'ils veulent faire comprendre leur insatisfaction et leur désespoir. Aussi, quand les provocations et les ripostes se déchaînent, ils sont pris en sandwich entre deux violences qui s'affrontent et se complètent. Il en est ainsi depuis la nuit des temps, malheureusement. Ce n'est donc pas demain que défiler se fera sereinement. Pas davantage que le débat ne peut être serein : le cumul des incompréhensions est bien trop douloureux pour que la population veuille sagement patentier. Elle ne demande qu'à être écoutée, comprise. Elle attend qu'on lui explique le pourquoi du comment, mais ça, les politiques n'ont pas encore compris qu'elle était mature. Sans doute est-ce pour cela que ces déchaînements violents perdureront. A ne pas savoir écouter, expliquer, l'impatience saisit tout le monde.